Tous les professionnels du tourisme s’accordent sur le fait que le tourisme interne sera la première option à actionner dès la levée de l’état d’urgence sanitaire. Plusieurs webinaires interposés entre institutionnels et professionnels, un hackathon sur le tourisme national -organisé les 11 & 12 & avril- plaident pour la nécessité de mettre en place des plans d’action de toute urgence en vue de sauver –même partiellement- le second semestre 2020.
D’un autre côté, l’élan de solidarité nationale qui s’est déclenché en cette période de crise et les appels à la consommation locale sur les réseaux sociaux devraient en principe aider toute action entreprise pour favoriser les voyages des marocains en interne.
Ces différentes initiatives susmentionnées font ressortir plusieurs pistes de réflexion, des enjeux et défis qui s’articulent pratiquement tous autour des orientations-en termes d’attente clients nationaux- suivantes :
- La recherche d’un tourisme en grands espaces : littoral, rural, arrière-pays,…
- La recherche d’un tourisme culturel spécifique aux consommateurs marocains : des expériences authentiques
- La recherche d’un éco-tourisme : solidaire
- La recherche de packages économiquement abordables pour les marocaines : notamment à des budgets similaires à ce qu’ils ont l’habitude de déployer dans des destinations prisées comme l’Espagne, le Portugal, la Turquie…
- La recherche de prestations de qualité
La question que se posent tous les acteurs du tourisme actuellement est bien évidement de quelle façon devrions-nous aborder ce tourisme interne ?
D’abord comment éviter un ressenti de ‘roue de secoure’ par les consommateurs marocains en l’absence de touristes étrangers ? Quels produits et quels packages pourrions-nous mettre en place rapidement pour répondre à leurs besoins, anticiper leurs craintes et accrocher leur curiosité pour redécouvrir le Maroc autrement ?
Dans ce papier je voudrais évoquer 3 propositions d’actions à mettre en place dans l’immédiat, et à programmer pour un déploiement rapide et efficace dès la sortie de la période de confinement.
Pour ce faire, j’ai essayé de faire un benchmark de relance du tourisme dans des situations similaires dans le passé tel que l’épidémie du SRAS qui avait touché plusieurs pays d’Asie en 2003*. En effet, 2 actions de 2 pays m’ont interpellé d’où les 2 premières propositions qui suivent. La 3ème proposition ne se base pas sur une action existante mais plutôt sur la notion de création d’évènements.
Proposition 1 : Faire des marocains nos propres ambassadeurs du tourisme
Après l’épidémie du SRAS, Singapour a procédé à la distribution de millions de cartes postales gratuitement aux habitants annonçant des événements touristiques à ne pas manquer sur l’île.
➢ Ce qu’on retient de l’action : Accrocher le résident et en faire un ambassadeur de tourisme
➢ Ce que l’action m’inspire : Transformer cette action en campagne digitale en utilisant la force
des réseaux sociaux ; l’impact ne peut être que plus important.
➢ Ce que je propose :
• Objectif : Faire des résidents des ambassadeurs de leurs régions et de leurs cultures locales et
déclencher ainsi l’envie de découvrir ou redécouvrir une région pour profiter d’une ressource
naturelle ou culturelle de celle-ci.
• Nature de l’action : Campagne de communication digitale
• Objet : Lancer des concours régionaux sur la base de cartes postales digitales (photos ou vidéos existantes pour une facilité de déploiement rapide), ces dits concours peuvent susciter l’intérêt et accrocher la curiosité des marocains en vue de voir leurs villes ou régions gagner la compétition. L’idée est de faire participer un maximum d’internautes marocains en appelant à un vote en ligne entre ‘5 cartes postales nominées’.
Ces concours peuvent être dupliqués à souhait pour mettre en valeur les particularités de chaque région et d’attirer l’attention sur ce qui peut y être fait/visité /gouté /apprécié :
- Le plus beau coucher du soleil ?
- Meilleure plage ?
- Meilleur plat de poisson ? couscous ? tagine ? pâtisserie ?…
- Meilleure endroit pour pratiquer un sport donné ? sports nautiques ?
- Le plus beau habit traditionnel local?
- …
• Qui peut déployer l’action : ONMT & CRT
Proposition 2 : Favoriser la consommation via le shopping
Le Vietnam a favorisé la consommation en multipliant les réductions et en diversifiant les activités
nocturnes dans les centres urbains
➢ Ce qu’on retient de l’action : Favoriser la consommation et le shopping à travers les
réductions dans les centres commerciaux et les malls, et en étendant les heures d’ouverture
de ceux-ci
➢ Ce que l’action m’inspire : déployer cette action dans les centres urbains mais surtout la
l’élargir en créant des souks saisonniers dans les différentes régions
➢ Ce que je propose :
• Objectif : favoriser la consommation de produits touristiques dans l’arrière pays en créant des points de découverte des produits locaux ‘Souks saisonniers’
• Nature de l’action : création de souks saisonniers atypiques et relayer cela à une campagne de communication digitale
• Objet : Il s’agit bien évidement de créer des souks saisonniers en prenant en compte les éléments suivants :
▪ Définir un lieu typique dans chaque région/ localité (dans l’arrière pays) et assurer la logistique de la création du souk (accessibilité pour les marchands et pour les clients entre autres)
▪ Définir une saisonnalité réfléchie, raisonnable et en fonction des options de déconfinement et la fin de cette année scolaire
▪ Recruter les marchands locaux qui sont capables de proposer des produits locaux à des tarifs très incitatifs
▪ Mise en valeur de ses souks sur tous les packages touristiques proposés par tous les acteurs du tourisme (hôteliers, agences de voyages, …)
▪ Création d’une plate-forme digitale regroupant tous ces souks (ou mettre toutes les activités disponibles d’une région donnée sur sa propre plateforme ??)
▪ Création dans chaque souk d’un ‘relais photos’ couplé d’un ‘hashtag’ spécifique pour que les visiteurs deviennent des ambassadeurs du tourisme pour ladite région.
• Qui peut déployer l’action : Régions & CRT (en coordination avec les acteurs locaux)
Proposition 3 : Multiplier des évènements estivaux de petite taille
Préparer des scénarios d’évènements prêts à l’emploi, et les faire cofinancer par des marques fortes
en relation avec la nature de l’évènement
➢ Ce que je propose :
• Objectif : Création d’évènements innovants pour attirer les voyageurs dans des régions pas nécessairement estivales
• Nature de l’action : Création d’évènements inédits
• Objet : Il s’agit de créer des évènements de petite taille (il ne s’agit pas de reproduire les festivals d’été sur les plages) qui correspondent à la région/ville/localité en question. Et surtout de les faire financer par les grands annonceurs qui n’ont probablement pas encore consommé leurs
budgets alloués au marketing direct durant cette période de confinement.
Voici quelques exemples d’évènements à produire ; classés par secteur d’activité des annonceurs à solliciter :
– Opérateurs télécoms : des concours de gaming dans des endroits improbables tel que les monuments historiques (palais, medersas, places,…). L’objectif étant de favoriser le tourisme dans les régions non balnéaires
– Géants de l’agroalimentaires : des souks saisonniers – des concours culinaires – des itinéraires de dégustation des cooking class – des animations autour de stands de street food…
– Marques Sport & bien être : des mini-tournois sportifs régionaux : sports
nautiques dans les régions balnéaires mais aussi des tournois de sport populaires dans les régions non balnéaires. Des défilés de mode locaux, des cosmétique classes autour de produits naturels locaux, des make-up class, des classes tissage et métiers du fil artisanaux (jellaba/caftans, cherbil, zarbiya, …)
– Banques/ autres : des festivals de musique de styles différents en s’inspirant de la
touche locale – des animations autour du patrimoine culturel local
• Qui peut déployer l’action : Régions/villes – CRT – Grandes marques/annonceurs
Ces propositions peuvent être des éléments déclencheurs d’un tourisme interne à la hauteur des attentes des voyageurs marocains qui auront certainement envie d’oublier cette phase de confinement dure pour tous. Cela dit, il y a un élément important à prendre en considération et qui
est le pouvoir d’achat des marocains après cette crise, nous auront certainement besoins de mesures incitatives pour le relancer et relancer ainsi non seulement le tourisme mais l’économie nationale toute entière.
Nous pourrions imaginer au moins 2 mesures incitatives pour favoriser le voyage, la première serait la distribution de chèques voyage par les entreprises – et même les administrations ?- à leurs collaborateurs. La seconde serait de faciliter l’accès au crédit voyage et permettre ainsi à un plus grand nombre de marocains à voyager dès que possible !