La loi de finances pour l’année budgétaire 2016 est parue au bulletin officiel n° 6423 bis du 21 décembre 2015. Nous avons présenté et commenté ensemble, ici, les principales mesures fiscales du projet de cette loi. Voici ce que nos députés ont finalement adopté. Ce sont les principales modifications d’ordre fiscal qui sont susceptibles de générer des incidences sur la gestion de l’entreprise.
Selon les dispositions de l’article 6 du Code Général des Impôts (C.G.I.), ces dividendes étaient exonérés de l’impôt sur les sociétés, au prorata du chiffre d’affaires offshore correspondant aux prestations de services exonérées.
À compter du 1er janvier 2016, la même exonération est accordée, au prorata des bénéfices correspondant à l’activité éligible.
Selon l’article 11 du C.G.I., ne sont déductibles du résultat fiscal qu’à concurrence de 50% de leur montant, les dépenses afférentes aux achats de marchandises, immobilisations et autres charges dont le montant facturé est égal ou supérieur à dix mille (10.000) dirhams et dont le règlement n’est pas justifié par chèque barré non endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement, virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec une créance à l’égard d’une même personne, à condition que cette compensation soit effectuée sur la base de documents dûment datés et signés par les parties concernées et portant acceptation du principe de la compensation.
À compter du 1er janvier 2016, cette limitation est applicable par jour. Par ailleurs, elle sera plafonnée à un montant de cent mille (100 000) dirhams par mois et par fournisseur.
Cette mesure aggrave les conditions dans lesquelles les opérateurs économiques pourraient procéder à des transactions en utilisant de l’argent comptant. Elle encourage la bancarisation de ces opérateurs tout en luttant contre l’économie informelle.
La proposition du gouvernement d’établir des taux différents selon le montant du bénéfice réalisé par l’entreprise a été maintenue.
Nous avions insisté sur le fait que l’objectif visant à instaurer une progressivité de l’impôt sur les sociétés, seul moyen d’en atténuer la pression, ne pouvait être atteint par ce système.
De ce fait, les bénéfices réalisés à compter du 1er janvier 2016 seront imposables selon un barème non progressif instituant les taux proportionnels suivants :
Bénéfice fiscal inférieur ou égal à 300 000 DH |
10% |
Bénéfice fiscal compris entre 300 001 DH et 1 000 000 DH |
20% |
Bénéfice fiscal compris entre 1 000 001 DH et 5 000 000 DH |
30% |
Bénéfice fiscal supérieur à 5 000 000 DH |
31% |
– L’article 89-8° du C.G.I. prévoit l’imposition des opérations d’échange et les cessions de marchandises corrélatives à une vente de fonds de commerce. À compter du 1er janvier 2016, sont aussi concernées, les opérations d’échange de biens mobiliers d’occasion.
– L’article 92-35° du C.G.I. prévoit l’exonération avec droit à déduction des opérations de transport international, des prestations de services qui leur sont liées ainsi que des opérations de réparation, d’entretien, de maintenance, de transformation, d’affrètement et de location portant sur les différents moyens dudit transport. À compter du 1er janvier 2016, sont aussi exonérées dans les mêmes conditions, les opérations de démantèlement d’avions.
– L’article 92 du C.G.I. est, par ailleurs modifié par l’ajout du paragraphe 46° instituant l’exonération avec droit à déduction des biens, matériels, marchandises et services acquis par la Fondation Lalla Salma de prévention et traitement des cancers, ainsi que les prestations effectuées par cette même Fondation.
– L’article 99 du C.G.I. est complété comme suit :
Le taux réduit de 10% est applicable, à compter du 1er janvier 2016, aux opérations de financements réalisées dans le cadre de contrats « Mourabaha » et « Ijara Mountahyia Bitamlik » pour les acquisitions d’habitations personnelles réalisées par des personnes physiques. Ces dispositions visent à harmoniser certaines dispositions fiscales en vigueur avec les nouveaux produits financiers liés à la « finance islamique ».
Le taux de 14% n’est plus applicable au transport ferroviaire qui est assujetti, à compter du 1er janvier 2016 au taux normal de 20%. Ceci constituera une augmentation des tarifs de l’O.N.C.F. de 6%, sauf si cet Office décide de ne pas répercuter l’augmentation de taxe sur les usagers. Nous doutons sérieusement de cette dernière possibilité.
– L’article 104 du C.G.I. instituant le prorata de déduction en matière de TVA a été modifié. Rappelons que la règle du prorata doit être observée par les assujettis effectuant concurremment des opérations taxables et des opérations situées en dehors du champ d’application de la taxe ou exonérées sans droit à déduction. Dans ce cas, le montant de la taxe déductible ou remboursable est affecté d’un prorata de déduction déterminé comme suit :
Au numérateur, le montant du chiffre d’affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au titre des opérations imposables, y compris celles réalisées sous le bénéfice de l’exonération avec droit à déduction ou de la suspension.
Au dénominateur, le montant du chiffre d’affaires figurant au numérateur augmenté du montant du chiffre d’affaires provenant d’opérations exonérées sans droit à déduction ou situées en dehors du champ d’application de la taxe.
Lorsque des entreprises englobent des secteurs d’activité réglementés différemment au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, la détermination du prorata annuel de déduction peut être effectuée distinctement pour chaque secteur. Jusqu’au 31 décembre 2015, les entreprises ne pouvaient le faire qu’après l’accord de l’administration. Cet accord n’est plus indispensable ce qui est davantage conforme à l’esprit des dispositions légales en vigueur et aux règles relatives à la gestion des entreprises. Néanmoins, la loi de finances précise qu’il appartiendra aux entreprises placées dans cette situation de se conformer aux obligations comptables en vigueur en adoptant des règles qui leur sont propres (article 118 du C.G.I.).
– L’article 106 du C.G.I. institue en matière de TVA, les mêmes plafonnement et limitation de la déduction de certaines charges acquittées en argent comptant applicables au titre de l’impôt sur les sociétés, selon les dispositions de l’article 11.
– L’article 123 du C.G.I. instituant les exonérations de TVA à l’importation est complété comme suit :
Exonération des biens, matériels, marchandises et services importés par la Fondation Lalla Salma pour la prévention et le traitement des cancers.
Exonération des aéronefs d’une capacité supérieure à cent places réservés au transport aérien ainsi que le matériel et les pièces de rechange destinés à leur réparation.
Exonération des trains et matériels ferroviaires destinés au transport de personnes et de marchandises.
– L’article 146 du C.G.I. a été complété comme il suit :
Ancienne rédaction : Tout achat de biens ou services effectué par un contribuable auprès d’un fournisseur soumis à la taxe professionnelle doit être justifié par une facture régulière ou toute autre pièce probante établie au nom de l’intéressé.
Nouvelle rédaction : Tout achat de biens ou services effectué par un contribuable auprès d’un fournisseur soumis à la taxe professionnelle doit être réellement réalisé et doit être justifié par une facture régulière ou toute autre pièce probante établie au nom de l’intéressé.
Bien que le critère de la réalité des opérations effectuées par un contribuable semble évident et qu’il soit largement réglementé dans d’autres lois, notamment la loi instituant les obligations des commerçants, l’administration fiscale a jugé utile de l’instituer dans le C.G.I. Cela confirme les efforts de cette administration visant à assainir l’environnement des affaires.
– La déclaration par procédés électroniques
L’article 155 a institué la télé-déclaration en prévoyant un échéancier précis. Dans la version actuelle de la loi, avant modification, les contribuables qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur ou égal à trois millions (3 000 000) de DH doivent adopter obligatoirement de tels procédés à compter du 1er janvier 2017. La loi de finances pour l’année budgétaire 2016 précise que tous les contribuables sont soumis à cette obligation à compter du 1er janvier 2017. Toutefois, ne sont pas concernés ceux qui déclarent leurs revenus selon le régime forfaitaire.
– Sort de la cotisation minimale
Les contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés perdent le droit d’imputation de la cotisation minimale payée lors d’exercices déficitaires sur l’impôt dû sur des exercices bénéficiaires ultérieurs. Seuls les contribuables soumis à l’impôt sur le revenu conservent ce droit sous certaines conditions très restrictives.
La note circulaire de l’administration fiscale relative à la loi de finances pour l’année 2016, nous renseignera sans doute davantage à propos de cette question importante à propos de laquelle les contribuables et leurs représentants se sont beaucoup prononcés.
Il est important de souligner que cette loi de finances a finalement abandonné les mesures tendant à aggraver certaines dispositions du C.G.I. relatives à la pénalisation de la fraude fiscale. Par ailleurs, la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 contient de nombreuses mesures concernant les pénalités et la vérification fiscale. Ces dispositions méritent une publication dédiée durant laquelle nous ferons un point complet sur la question.